Je m’appelle Séverine, j’ai 41 ans et je vis à Metz. Mon activité professionnelle est relative au service à la personne en l’occurrence employée de maison qualifiée pour le compte de particuliers, lesquels me rémunèrent par le biais du Cesu.
Cette activité a débuté un peu par hasard, en 1999, je cherchais du travail, les annonces parues dans certains journaux locaux avaient attiré mon attention, j’avais donc postulé, ne sachant pas que ce serait le début de l’enfer sur terre pour moi.
Le premier particulier pour lequel j’avais commencé à bosser, était un couple avec deux enfants, vivant dans une vaste maison. Les tâches consistaient à … m’occuper de tout ! Absolument tout : ménage, repassage, aller chercher les gamins à l’école, préparer les repas où la mère s’arrangeait pour que ce soit toujours des plats fait maison et copieux histoire qu’elle puisse réchauffer une bonne partie le soir. Bref, tout était à ma charge entière, plus personne ne faisait quoi que ce soit dans cette maison. J’étais devenue le » larbin » de cette famille et des mioches qui écoutaient évidemment que dalle, dont le plus jeune, âgé à peine de 3 ans, m’avait balancé un jour après avoir avoir jeté du Kiri par terre tout en l’écrasant volontairement : » de toute façon tu es payée pour ramasser « . Les bras m’en étaient tombés au même titre que j’en étais restée bouche bée. Je bossais tous les jours sauf le mercredi pour un taux horaire payé au smic, sans pourboire, ni 13ème mois, ni autre avantage. Un jour, il s’agissait d’ailleurs du jour de mon anniversaire, un samedi, la mère m’avait demandé de garder ses mômes afin qu’elle puisse aller profiter d’une matinée shopping, c’est avec un culot monstre comme à l’accoutumée qu’elle voulait également que je change les draps des lits pendant le temps de garde … une autre fois, ce fût une garde de ses gamins plus deux d’un couple d’amis, de 18h à 2h, payée au black 300 francs ( 46 euros de nos jours ), dérisoire surtout émanant de gens aisés.
J’ai pété les plombs. Je suis partie.
Les autres particuliers qui ont suivi n’ont guère été mieux, si ce n’étaient pires …
Il y a plus de deux ans, je me déplaçais à 30 kilomètres de Metz, n’étant plus véhiculée, je prenais les transports en commun, d’abord un bus, puis le train, et un trajet de marche loin d’être touristique pour arriver sur mon lieu de travail. Il s’agissait d’une famille composée de 5 personnes, dont 3 enfants, vivant dans un appartement spacieux, deux salles de bain, des miroirs partout …
Le temps de travail avait été estimé par la maîtresse de maison à 3h chaque mardi et 3h le vendredi, incluant le nettoyage complet de l’appartement à chaque fois ainsi que le repassage de toute la famille ( monsieur portait des chemises vu qu’il bossait dans le secteur bancaire ). Je devrais tout faire durant ces trois heures, vider le lave-vaisselle et ranger la vaisselle, débarrasser leur bordel du petit-déjeuner, le bordel de tout le monde dans leur appart, changer occasionnellement les draps des lits, les vitres, descendre des poubelles de 100 litres qui dégueulaient … je n’en pouvais plus, je bossais pour d’autres particuliers à côté aussi où la cadence était très soutenue aussi, c’était devenu un calvaire au quotidien. Payée un peu au-dessus du smic, les frais de train étaient pour ma pomme, pas de pourboire encore moins d’ étrennes à Noël, et cerise sur le gâteau, je me faisais encore souffler dans les bronches si quelque chose avait été mal fait, ou oublié. Ce contrat avait par chance pris fin, une rupture conventionnelle, donc une ouverture de droits aux allocations chômage mais surtout débarrassée de cette psychopathe qui ne foutait absolument rien chez elle.
Je bossais pour un couple jusqu’à l’été dernier, auquel j’avais proposé lorsqu’ils avaient besoin de mes services pour garder leur enfant en plus des interventions de ménage avaient lieu une fois par semaine à leur domicile, un forfait garde de 20€ pour 4h en moyenne et n’étais pas pointilleuse si c’était davantage …
Serviable, dévouée, je leur rendais service quand ils s’absentaient les week-ends voire pendant quelques jours de vacances, j’allais m’occuper de leurs chats de manière complètement désintéressée.
Ceci a débordé, ils ont pressé le citron jusqu’au bout. Après plus de deux ans de bons et loyaux services, je veux ne plus y retourner non plus aujourd’hui.
La coupe était pleine depuis plusieurs mois. Il a suffit de deux psychopathes supplémentaires qui m’ont pourri la vie en seulement quelques semaines, pour que cela déclenche un vrai déclic.
L’une était devenue quasiment hystérique quand elle s’était aperçue qu’une étagère de salle de bain qu’elle m’avait demandé de nettoyer, pleine à craquer de produits d’hygiène corporelle et même de bouteilles vides, crades, n’avait pas été rangée comme elle le souhaitait selon un ordre très précis et avait guère apprécié mon initiative de jeter un gel lavant intime qui n’avait probablement jamais servi par ailleurs, périmé depuis plusieurs années, tout comme elle avait des paquets biscuits ouverts depuis des mois, avec lesquels on aurait pu jouer aux osselets, mais qu’elle avait ostensiblement gardé bien que, cette fois ci, sentant probablement l’odeur, je l’avais laissé de côté avec des tas de denrées périmées depuis deux, trois, cinq, dix ans … qu’elle a voulu conserver ! ( » cela n’a plus de goût, mais je les garde « , dixit l’intéressée ).
La seconde ne comprenait pas que je ne puisse pas répondre à tous ses caprices, exigeant des tâches ménagères très minutieuses dans un laps de temps que nulle employée de maison aurait pu accomplir mais selon elle, c’est moi qui était forcement nulle, peu compétente, pas assez rapide, enfin bref, le coup classique des gens qui ne foutent plus rien du tout chez eux et prennent leur » femme de ménage » telle un véritable esclave, au bas mot.
À ce jour, j’ai » raccroché « , certains de mes contrats se terminent ce mois-ci, j’ai négocié mon départ afin de ne pas être en porte-à-faux vis-à-vis de Pôle Emploi et je recherche activement autre chose. J’ai les velléités de ne plus jamais reprendre du service dans ce secteur d’activité.
Avec le recul et beaucoup de sérénité aujourd’hui, je me dis que j’étais chez les dingues, le plus édifiant, c’est qu’il s’agissait de personnes très aisées financièrement, qui pouvaient se permettre de ne pas regarder à la dépense à propos des heures de travail effectuées par leur employée de maison. Je pense que l’argent leur est monté à la tête à un moment donné, que ces personnes n’avaient pas reçu non plus une éducation élémentaire, qu’elles étaient très narcissiques voire sadiques. De plus, me sachant peu fortunée, vivant modestement, jamais elles ne m’ont fait la moindre fleur, ni le moindre compliment, allant jusqu’à se plaindre or que plus j’en faisais avec un nombre incalculable d’heures non payées, plus je les avais sur le dos, moins elles étaient satisfaites et plus elles avaient à redire.
Je préfère terminer s.d.f, sans fric, que d’avoir à retourner bosser pour ce genre de dingues, l’honneur n’a pas de prix, la dignité également.
Octobre 2020