J’ai travaillé dans une grande entreprise “sociale et solidaire “ qui promet un CDI qui n’existe pas et qui était en train d’être racheté par une autre entreprise au moment de mon embauche en CDD. 
Conditions de travail :
– sous-effectif 
– harcèlement moral (refus de poser 1 jour de congés alors que je n’en ai pas eu depuis plusieurs mois)
Et j’en passe…


Cette entreprise aura eu raison de moi

Je serais en arrêt maladie plusieurs mois pour burn-out suite à cela, mais la médecine du travail continuera le harcèlement qu’avait commencé mon entreprise et me dira lors d’un entretien avec eux que ce n’est pas la faute de l’entreprise et m’incitera à dire que j’ai des problèmes personnels pour se dédouaner de toute responsabilité.
Lors d’un entretien téléphonique avec mon entreprise pendant mon arrêt maladie, il me suggère de démissionner, ce que je refuse et je propose que l’on s’arrange pour rompre mon CDD à l’amiable pour pouvoir enfin me reconstruire et ne plus jamais entendre parler de cette entreprise qui a fini de m’achever.
J’apprends un an plus tard que des géomètres prennent des mesures dans le local où je travaille car l’entreprise vends le local.
Tous mes anciens collègues sont poussés vers la sortie au fur et à mesure.
Petite anecdote entre collègues nous appelions nous même l’entreprise esclavagiste et nous dirons de nous-mêmes que nous sommes des esclaves.

– Ça ne vous dérange pas de faire une ou deux journées d’essais sans contrat et après on verra, on vous paiera si on vous garde ? 

J’ai travaillé dans une autre grosse entreprise également, payé le SMIC dans un centre d’appel, à l’époque l’entreprise est sous sauvegarde de justice et un manager surveille tous nos fait et gestes:
– interdiction de parler avec son collègue d’à côté ;
– aller au toilette seulement pendant sa pause de 10 minutes ;
– pas le droit de prendre son téléphone avec nous aux toilettes … 
– appel chronométré, écouté, nous devons rendre des comptes sur le nombre d’appels pris chaque jours ;
– heures supplémentaires non rémunérées et notées sur un bout de papier à la fin de la journée pour récupérer quand ça arrangera l’entreprise.

En ce qui concerne les entretiens d’embauches pour diverses entreprises, voilà les questions que certains recruteurs posent :
– Quel est le métier de vos parents?
– Avez-vous prévu d’avoir un enfant?
– Est-ce que ça rapporte bien le chômage?
– Combien vous touchez au chômage?
– Ça vous dérange pas de faire une ou deux journées d’essais sans contrat et après on verra, on vous paiera si on vous garde ? 
– Est-ce que vous habitez seule, en couple ou chez vos parents ? 

En ce qui concerne les agences d’intérim ce n’est pas mieux, on vous ment en vous promettant une mission avec un CDI à la clef pour que vous acceptiez la mission.
Certains commerciaux des agences d’intérim vous forcent également à accepter la mission qu’ils vous proposent.
Effectivement ils sont commerciaux donc il faut faire du chiffre !

Nous en avons traversé des rues, des avenues, des ponts, des murs et bien d’autres encore
Pour finir, j’ai commencé à travailler à 18 ans lorsque j’étais étudiante en terminale dans une grande chaîne de restauration rapide, j’avais postulé trois fois pour décrocher un CDI à temps partiel en horaires décalés et coupures payer au SMIC et également spécialiste de l’esclavage moderne. J’avais à l’époque traversé une rue dans mon quartier pour trouver cet emploi, en effet n’ayant pas le permis et étant mal desservi par les transports en commun je n’avais pas vraiment le choix.
Comme beaucoup d’enfants de la classe moyenne j’ai dû travailler, finir à minuit et avoir fait mes devoirs et être en cours le lendemain à 8h du matin avec une heure de transport le matin et 1h le soir.
J’ai vite été amené à choisir entre continuer mes études ou travailler.
J’ai choisi le travail par dépit, je n’aurais certainement pas fait ce choix si mes parents avaient pu assurer financièrement.

Je travaille depuis 12 ans, enchaîne les CDD, missions d’intérim et même le bénévolat. Mon salaire n’a quasiment jamais dépassé le SMIC !!

Merci Mr le président pour vos conseils de traverser la rue.

Nous en avons traversé des rues, des avenues, des ponts, des murs et bien d’autres encore.

Si vous pouviez nous embaucher à l’Élysée, l’Assemblée nationale ou autre nous serions ravis de pouvoir participer à la vie de notre pays.

Nous habitons en dehors du Périphérique, dans des banlieues, nous travaillons souvent 38h par semaine ou plus et sacrifions notre vie privée pour nous rendre au travail (10h voir plus par semaine de trajet non rémunéré et tout cela pour le SMIC). 
Personne ne nous a jamais parlé du télétravail avant la crise sanitaire, cela nous était même refusé à l’époque car la France est en retard sur bien des sujets et qu’en tant que simple petit employé forcément nos idées sont mauvaises ou pas entendues. Aujourd’hui pour le télétravail c’est ok. Devons-nous attendre des épidémies pour changer les choses?

Ou alors nous sommes aussi de temps en temps au chômage quand notre CDD arrive à son terme.

J’ai voulu traverser la rue, dans ma ville il y a trois boulangeries, deux petites entreprises qui n’ont pas les moyens de recruter et un grand distributeur alimentaire, j’ai des amis qui y travaillent et qui mettent des oranges, des radis et des carottes dans les rayons pour le SMIC en horaires décalés et qui ont été pistonnés pour y rentrer, car oui il faut être pistonné Mr le président même pour survivre en France.
J’ai postulé pour faire le ménage, on ne m’a jamais rappelé.
Et la Mairie de ma ville n’embauche que des amis!

Je continuerais de travailler comme je l’ai toujours fait depuis que je suis majeur.
Même bénévolement car je veux pouvoir agir, faire quelque chose de ma vie, ne pas être « assisté », pouvoir être libre, parler, ne pas être stigmatisé et surtout car cela ferait trop plaisir à certains de nous faire croire que sans eux nous ne sommes rien et que l’on dépend de la société.

Jamais nous ne lâcherons et jamais nous n’abandonnerons
Enfants de classe moyenne et pauvre nous restons entre nous, n’avons aucune relation pour nous aider à nous sortir de notre milieu social et avons été parqués dans des quartiers fermés par des murs « imaginaires », ses murs n’existent pas vraiment mais dans notre inconscient ils sont bien présents et ils font des ravages. 
La sensation, cette sensation d’être condamnée, enfermée dehors sans avoir commis aucun délit.
Nous sommes seulement nés de parents ouvriers, petits artisans, petits fonctionnaires, issus de parents français ou issus de parents immigrés.
Est-ce ce un délit ?
C’est une question que nous nous posons de temps en temps.
Mais jamais nous ne lâcherons et jamais nous n’abandonnerons car nos parents ont tout fait pour nous avec leurs petits moyens, car nous voulons qu’ils sachent qu’on va se battre pour eux aussi à qui on a fait croire qu’ils n’étaient rien et que leurs paroles ne comptaient pas.

Peut-être, nous aussi, Français, immigrerons-nous un jour ailleurs pour avoir un meilleur avenir et trouver notre place dans ce monde ou dans un pays qui nous acceptera et nous donnera notre chance.

Je tire mon chapeau à tous ses immigrés qui sont dans notre pays loin de leurs familles et qui se battent pour survivent, c’est déjà difficile pour nous en tant que Français, alors je n’imagine même pas pour eux qui ne savent pour certains ni lire, ni écrire, ni parler français. Pour ceux, loin de leurs racines, ses oubliés aussi, à qui on ne porte pas assistance.


C’est aussi pour eux aujourd’hui que je vous écris, pour ceux qui n’ont pas les mots.

Août 2020.

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